Le Thérémin en quelques mots
Deux antennes, un ampli… Le Thérémin intrigue pour sa technique de jeu si particulière : pas de cordes, de touches, d’embouchure…
Inventé en Russie, en 1919 par Léon Thérémin, c’est l’un des tout premiers instruments de musique électronique de l’histoire…
Comment ça marche ?
Le Thérémin est un instrument de musique inclassable à tous points de vue. En plus d’être le premier instrument de musique électronique de l’histoire, c’est aussi le seul qui se joue littéralement « dans le vide »… Le musicien interagit avec deux antennes qui délimitent deux champs électromagnétiques distincts. L’antenne droite est à l’origine de la hauteur du son tandis que celle de gauche permet l’articulation des notes.
Antenne de pitch
Plus la main est proche de l'antenne et plus le son sera aigu
Antenne de volume
Positionner la main dans la boucle revient à couper le son, c'est en l'éloignant de l'antenne que l'on module le volume sonore
Un peu d'histoire
Lev Sergueïevitch Termen (1896-1993)
Le Thérémin a été inventé en 1919 par un brillant ingénieur et musicien Russe, Lev Sergueïevitch Termen (Лев Сергеевич Термен, ou Léon Thérémin). Né en 1896 à Saint-Petersbourg, il consacre sa vie à la recherche scientifique.
Alors qu’il travaillait à la conception d’un dispositif électronique destiné à mesurer la densité des gaz, il observe un impact non négligeable des effets capacitifs extérieurs sur la fiabilité de ses mesures. Autrement dit, en s’approchant de son appareil, il fait varier la tension de mesure. Très rapidement, l’idée lui vient de détourner cet effet non désiré, et c’est ainsi qu’il développe son instrument de musique révolutionnaire. Dès les premiers prototypes, il attise la curiosité de son entourage. « Ouah ! Le professeur Termen fait de la musique avec un voltmètre ! ».
Violoncelliste amateur, il transpose naturellement quelques pièces de son répertoire sur sa nouvelle invention qu’il continue de développer jusqu’à obtenir un instrument valable, muni de ses deux antennes caractéristiques, auquel il donne son nom : Терменво́кс (termenvox « la voix de Thérémin » – aujourd’hui on nomme l’instrument thérémin tout court).
En 1922, il est invité à présenter ses travaux à Lénine, qui subjugué par cette brillante innovation soviétique, l’envoie en tournée à travers le pays. Et même au-delà, en Europe, et jusqu’aux États-Unis.
Je vous encourage vivement à lire l’ouvrage d’Albert Glinsky, Theremin – Ether Music and Espionage, biographie de référence. Un chapitre est également consacré à l’extraordinaire destin de Léon Thérémin dans Les Fous du Son de Laurent de Wilde.
Cent ans après l’invention du thérémin, l’effet « wow » de sa nouveauté est encore bien présent. On voit encore fleurir tous les jours sur les réseaux sociaux des capsules vidéos virales « LOOK THIS IS AMAZING » blablabla. Pour beaucoup de gens, le thérémin c’est cet objet absurde avec lequel joue Sheldon Cooper dans The Big Bang Theory, ou encore le son caractéristique des extra-terrestres dans les films de science-fiction des années 50.
On doit la survie de l’instrument aujourd’hui à cinq personnalités hors-normes, qui ont cru en son potentiel musical et ont su le faire vivre.
Clara Rockmore lui a donné ses premières lettres de noblesse dès les années 40 en s’attachant au répertoire classique. Son approche reste unique et son jeu continue d’inspirer les théréministes du monde entier. En parallèle, Samuel Hoffman amène le thérémin à Hollywood, avec beaucoup de succès.
Robert Moog, connu pour être à l’origine du synthétiseur et en fin de compte de la musique électronique telle qu’on la connaît aujourd’hui, fait ses premiers pas en construisant divers modèles de thérémin – dont il développe une version transistorisée. C’est grâce à lui que le thérémin est encore fabriqué de manière industrielle de nos jours, et donc accessible à tous ceux qui souhaitent tenter l’expérience…
Lydia Kavina a été pendant des années la seule ambassadrice de son instrument, capable de l’enseigner et de le présenter avec élégance et talent. Son élève, Carolina Eyck a amené le thérémin vers de nouveaux sommets, avec une technique de jeu à 8 positions qui fait référence.
Le défi du théréministe aujourd’hui s’inscrit dans cette démarche : aller au-delà de l’effet « wow », faire de la musique !